Sur la côte ouest de l’Irlande, Kitepower, une entreprise néerlandaise, fait voler d’immenses cerfs-volants pour produire de l’électricité renouvelable avec du vent. Baptisée « énergie éolienne aéroportée », cette nouvelle technologie s’appuie sur un mouvement répété ascendant et descendant pour générer de l’électricité, stockée ensuite dans une batterie au sol grâce à un câble relié au dispositif.
L’Irlande est un pays très venteux, surtout sur sa côte ouest. Par conséquent, elle mise sur l’énergie éolienne, à travers les gigantesques pales en mer comme sur terre, pour assurer sa transition énergétique. Mais, depuis 2023, les autorités se tournent aussi vers une nouvelle technologie pour compenser les limites des éoliennes traditionnelles. Baptisée « énergie éolienne aéroportée », cette innovation repose sur des cerfs-volants géants reliés à un générateur, afin de transmettre l’énergie produite par le vent au réseau. C’est une nouvelle piste prometteuse pour générer de l’électricité propre, à destination des zones les plus isolées.
Les cerfs-volants font des va-et-vient répétés comme un « yo-yo »
Fabriqués par Kitepower, une société néerlandaise développant des systèmes éoliens aéroportés mobiles, les cerfs-volants géants de 60 m² en moyenne sont dotés de cordes et de poulies, ainsi que d’un générateur. Un mécanisme les fait s’envoler jusqu’à une altitude maximale de 400 mètres, pour les faire redescendre jusqu’à 190 mètres, puis les faire remonter à la même hauteur.
Ce va-et-vient répété (comme un « yo-yo ou un moulinet de pêche) permet de produire près de 30 kilowattheures (kWh) d’énergie propre, transmis via un câble à une batterie au sol. L’électricité générée est ensuite injectée dans le réseau. Un seul cerf-volant suffirait pour recharger une batterie de 336 kWh.
Kitepower teste sa technologie à Bangor Erris
« C’est une quantité d’énergie significative, suffisante pour alimenter un avant-poste isolé, une petite île, une station polaire ou même un chantier de construction », précise Andrei Luca, responsable des opérations chez Kitepower. Selon le responsable, un cerf-volant peut être installé n’importe où et en seulement « vingt-quatre heures ».
Depuis 2023, Kitepower teste sa technologie à Bangor Erris, sur la côte ouest de l’Irlande. L’entreprise a conçu deux versions de son éolienne cerf-volant. Le premier, dont la voile mesure entre 40 et 60 m² à plat, peut générer au moins 10 kWh d’énergie. Et le second, qui a une surface de jusqu’à 80 m², peut atteindre les 100 kWh.
Kitepower veut concevoir un système de stockage par batterie, alimenté directement par ses cerfs-volants
Kitepower a démontré l’efficacité de son système en janvier dernier, lors de la tempête Eowyn, qui a provoqué d’importantes coupures de courant à travers l’Irlande. « Le cerf-volant a fourni une électricité ininterrompue avant, pendant et après la tempête », assure Andrei Luca.
L’entreprise prévoit de lancer le K-BESS, un système de stockage par batterie, alimenté directement par ses cerfs-volants, pour faciliter la production. En une dizaine d’heures, ce système pourrait produire 400 kWh d’électricité, assez pour recharger pleinement une dizaine de voitures électriques…
Les cerfs-volants géants évitent d’avoir à bâtir d’immenses et coûteuses éoliennes tubulaires
Ce concept d’éolienne cerf-volant présente de nombreux avantages. D’après ses concepteurs, il permet de générer de l’électricité loin de tout, dans les zones les plus isolées, en plus d’être moins invasif au niveau du paysage et de ne pas dépendre d’une chaîne d’approvisionnement en carburant (diesel) pour fonctionner.
Aussi, cette technologie permet d’éviter d’avoir à bâtir d’immenses et coûteuses éoliennes tubulaires, dont le socle de béton comme le recyclage des pales en métal n’ont rien d’éco-responsables. Kitepower note que son cerf-volant pourrait être déployé dans les îles de l’Union européenne, en mer ou dans les zones avec un foncier limité comme en Irlande.
Kitepower devra relever des défis en matière de réglementation, de sécurité et de fiabilité du système
L’Irlande, qui est une île britannique, dépend fortement de l’énergie éolienne. Son parc installé fournit déjà environ un tiers de son électricité. Le gouvernement envisage d’installer environ 20 gigawatts (GW) d’éolien offshore supplémentaires, voire 37 GW, d’ici à l’horizon 2050. Les projets de cerfs-volants géants pourraient contribuer à atteindre cet objectif. Mais Kitepower devra d’abord relever des défis en matière de réglementation, de sécurité et de fiabilité du système.
Notons toutefois que ce type de projet essaime l’Europe depuis quelques années. On en trouve notamment en Allemagne, un pays disposant d’énormes capacités en énergie éolienne, mais ayant encore recours à des centrales à charbon polluantes pour alimenter ses foyers et industries.