Accord avec le Mercosur : l’enjeu d’une agriculture responsable

L’accord de libre-échange entre le Mercosur et l’Union européenne devrait être signé dans la première semaine de décembre, sauf revirement. Il fait l’objet de vives critiques de la part des paysans et des ONG environnementales. Ces dernières y voient une menace pour l’agriculture durable.

Depuis une semaine, les agriculteurs manifestent dans toute la France pour dénoncer le traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur (Argentine, Bolivie, Brésil, Paraguay, Uruguay). Dans son volet commercial, cet accord prévoit la suppression de 92 % des droits de douane sur les produits importés depuis les pays du Mercosur.

L’accord avec le Mercosur permettra une arrivée massive des produits agricoles sud-américains

Cette réduction des tarifs douaniers permettra à l’Europe de mieux vendre ses produits industriels, dont les voitures, médicaments, machines, vêtements et vins. Du côté des pays d’Amérique du Sud, on attend une hausse de l’exportation de viande de bœuf, de poulet et de sucre. Alors que le traité est présenté comme gagnant-gagnant, les paysans européens redoutent de voir arriver sur le marché unique de la viande à très bas prix.

Des coûts de production trop bas en zone Mercosur

En effet, les coûts de production dans le Mercosur sont inférieurs à ceux de l’Europe, en particulier de la France. On y trouve une main-d’œuvre moins chère ainsi que des normes environnementales et phytosanitaires moins strictes. Ces facteurs expliquent les prix bas, qui vont entrainer une arrivée massive de produits agricoles sud-américains en Europe. Les paysans français, surtout les éleveurs, dénoncent une concurrence déloyale et appellent le gouvernement à ne pas signer l’accord en l’état actuel ou à obtenir l’harmonisation des réglementations.

L’agriculture sud-américaine utilise de nombreux pesticides et hormones interdits en Europe

Outre la baisse de la rémunération des agriculteurs français et une menace à long terme pour la souveraineté alimentaire française, le traité avec le Mercosur fait courir des risques sanitaires. De fait, l’agriculture sud-américaine utilise de nombreux pesticides et hormones interdits en Europe. Notamment l’œstradiol 17-β, une hormone de croissance pour bétail reconnue comme cancérigène. En octobre dernier, le Brésil a d’ailleurs dû suspendre ses exportations de viande de bœuf vers l’Europe, à cause de cette molécule citée dans un rapport de la Commission européenne.

Vers une hausse de la déforestation en Amérique du Sud

De leurs côtés, les ONG pointent aussi et surtout des risques majeurs pour l’environnement. En effet, le traité de libre-échange avec le Mercosur déboucherait sur une augmentation de la production agricole et donc une hausse de la déforestation en Amérique du Sud, en particulier une destruction de l’Amazonie. Cette déforestation provoquerait une perte de biodiversité et accentuerait la pression sur des écosystèmes déjà fragiles. Elle réduirait aussi la capacité du continent sud-américain à stocker le dioxyde de carbone libéré dans l’atmosphère.

De la nécessité de défendre une agriculture de proximité bénéfique à tous les niveaux

Face à ces risques, Foodwatch France pense qu’il est crucial de rendre obligatoire l’étiquetage de l’origine des produits alimentaires si le traité doit être signé. Cela permettrait de savoir d’où proviennent les produits que nous consommons et décider en toute connaissance. De son côté, la Fondation Terre de Liens s’oppose aux projets d’agriculture intensive promue par les accords de libre-échange. Elle défend une agriculture de proximité bénéfique pour l’emploi, la rémunération des paysans et l’environnement.

L’accord avec le Mercosur menace les exploitations bio

Les associations estiment qu’il faut protéger spécialement les agriculteurs bio et locaux menacés par les grandes exploitations, alors qu’ils font déjà face à une crise de la demande. Il serait par exemple utile, dans le cadre de la révision de la PAC, de reconsidérer les critères de surface pour soutenir les actifs agricoles. En somme, la lutte contre l’accord avec le Mercosur ne relève pas uniquement d’une question économique, mais également sanitaire et écologique.

Auteur de l’article : Florent Fort

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